Toute l’équipe du POCTB a le plaisir de vous annoncer la ré-ouverture
de notre espace d’expositions au 5 rue des Grands-Champs à partir
du jeudi 28 mai pour l’exposition de 300 dpi av. J.-C. de Yoan Beliard.
Au commencement, une certaine poussière que les visages ne se lassent pas de surprendre. La terre récente. Rouge. Humide. L’écho de pas. Partout, il y a autant de vide que de plein. Voilà le commencement, et ce qu’il y eut, avant, en avant du commencement, dans les premières secondes où crépitent déjà les images. Depuis, d’autres soleils – d’autres ombres aussi – se sont élevés, qui courent noircir les visages et tailler, dans les premières lumières de juin, les contours de ce que pourrait être notre visage. C’est cette image, de nous peut-être, que l’on voit ; droite, debout, qui fait face. Aux couleurs effacées. Qui s’avance et, à mesure, se découpe en d’autres images, en ramifications, en pixel, en dpi. En s’approchant on distingue des disques, des rectangles, des formes lisses qui laissent entrevoir une ouverture et parfois la structure d’acier qui tient ensemble ce tout de fragments et de fossiles. Les pierres se détachent comme des stèles marquées, dont le temps aurait effacé les aspérités pour n’en laisser que l’ombre. A leur rencontre, on se demande d’où viennent les tessons et les monuments, les objets récupérés dans d’autres époques, qui sont comme notre corps propre. Lorsque les doigts voudraient effleurer et saisir tout ce temps passé, il n’en reste que l’image, figée, qui se dérobe et s’installe, délivrée de son poids. Le temps a été pris dans les filets de la résolution et de l’instant. C’est le temps en avant ; une colonne dorique à la forme d’une bombe, la rencontre nécessaire d’un aérographe et d’une enclume sur une table d’orientation. Une unité de tons qui entretient le mystère de l’origine. Des vides pleins. On imagine ces ruines baignées de soleil, qui parlent entre elles de l’odeur des myrtes. Un paysage de pierres, là où brille le bleu-vert de la mer, avec l’écume, où se dessine l’accord silencieux des jours. Pourtant, bientôt apparaissent les traces d’autres ruines, à venir : la marque d’un dépôt de toner, ce qu’il reste d’une image magnétique. On ne sait plus alors si resplendit le grand soleil grec ou les lumières décolorées du présent qui s’efface, comme les restes d’un journal dont on ne verrait bientôt plus les lettres. C’est dans cette indistinction du temps et de la matière que s’élèvent ces vestiges. Entre le surgissement et la décomposition, ils gardent, comme une tâche de naissance, la marque incorporée d’un passage. Mais avant tout cela, avant le commencement et avant le silence, s’aventurant parmi elles, on entrevoit une brèche qui laisse surgir le temps, un temps en avant.
Ugo Casubolo Ferro